PRESENTATION
ACTIVITES
à Noter ...

Visites

   visiteurs

   visiteurs en ligne

L'école nous apprend du nouveau sur notre enfant.

 

 

« Je connais mon enfant »:

 

un bon nombre de professeurs à l'occasion d'une rencontre qu'ils ont souhaitée avec des parents suite à des accidents de l'adaptation scolaire, ont entendu cette phrase. Le père ou la mère la prononcent dans une situation qui ne leur est pas agréable et cette contrariété se comprend facilement.

L'enseignant de son côté est placé dans une situation embarrassante; son but principal est de rechercher la coopération de la famille pour améliorer la situation de cet élève et il est tenté, dans un premier temps, de comprendre cette réplique comme une condamnation de sa démarche: « ce que vous me dites à propos de mon enfant n'est pas possible ». Il se met alors à craindre l'échec de sa démarche; les parents, pense-t-il, n'ont pas confiance en lui et, si c'est le cas, comment sortir de cette impasse?

Dans le cas le plus fréquent, l'émotion négative du professeur l'emporte sur l'interprétation correcte de la réaction parentale. Le parent et l'enseignant se trouvent dans des positions tout à fait dissymétriques: le professeur apporte des observations, fait des constats, la famille manifeste une réaction de surprise, face à un choc.

 

D'où provient la conviction de bien connaître son enfant?

 

Même si elle peut provoquer de fausses manœuvres, cette certitude s'explique de manière très sérieuse. Elle s'enracine d'une part dans les relations entre les parents, la mère surtout, et le très jeune enfant et d'autre part dans le mode de vie familial. Est-ce utile de rappeler l'étroite proximité qui existe entre la mère et le bébé à partir de la naissance? La mère connait les besoins de l'enfant de manière instinctive; elle devine et interprète ses manifestations corporelles, ses pleurs, avec beaucoup de pertinence. Le mode de vie familial est marqué par le style de cette toute petite société où règnent l'implicite et la complicité. Les personnes qui composent la famille s'ajustent les uns aux autres et chacun a vite l'impression d'évoluer dans une ambiance familière où les surprises sont exclues. Bien sûr, chacun a ses particularités mais les codes très restreints en même temps qu'assez stricts, ne permettent pas de fortes originalités dans les comportements.

Rappelons que la scolarité débute assez souvent entre trois et quatre ans. Lorsque l'enfant entre à l'école il est enveloppé dans cette relation de très grande proximité et ses parents éprouvent de façon aussi naturelle que forte, le sentiment de bien le connaître.

 

Notre enfant peut-il être différent à l'école?

 

Entendons-nous bien sur le sens à accorder à cette différence. L'enfant ne devient pas un autre, il n'y a pas de « double » ou de « faux » quelque part.

Simplement le fait de se trouver placé dans un lieu de vie différent va influer sur une construction qui est – ce point est essentiel – en cours.

Entré à l'école, de nombreux traits de son comportement vont se conserver, voire se renforcer. D'autres vont s'atténuer, très sensiblement parfois; des conduites encore jamais observées vont se produire.

Le développement d'un enfant n'est pas le déroulement d'un programme, c'est la résultante d'une interaction entre des traits particuliers et un milieu. Le milieu scolaire offre des sollicitations et impose des limites qui n'étaient pas présentes à la maison, il est donc prévisible, en toute logique, que se produisent alors des réactions nouvelles au sens où elles ne pouvaient pas avoir lieu auparavant.

L'enfant ne devient pas un « autre », il ajoute à sa façon d'être de nouvelles réactions.

 

Quelles nouveautés apporte l'école?

 

Elles sont très nombreuses et constituent un catalogue abondant mais on peut les réduire à quatre catégories principales

 

1/ La vie scolaire est contraignante.

L'école, en raison de ses buts (apprentissages) et de ses conditions d'encadrement (effectifs très consistants) n'a pas d'autres solutions que de cadrer étroitement les élèves. Les règles de vie et de travail touchent au détail et les enseignants ne peuvent pas s'autoriser beaucoup de souplesse.

 

2/ Les contenus de l'activité scolaire sont exigeants et très normés.

La culture scolaire conçue comme le savoir défini par les programmes n'est pas très proche de l'expérience enfantine et plus ou moins éloignée des transmissions familiales. De surcroît, l'organisation de la scolarité par cycles et par classes ne permet pas beaucoup de souplesse quant aux rythmes individuels des apprentissages. Pour dire cela très banalement: « on ne peut pas remettre au lendemain ».

 

3/ La vie scolaire est sociale.

Les enfants apprennent ensemble, jouent ensemble, se déplacent par groupes. Les installations matérielles ne sont pas faites pour l'isolement, la tranquillité. Les temps dédiés à l'activité personnelle sont rares et brefs. Formulée avec un peu de franchise on peut dire de cette condition d'élève qu'elle nous oblige à supporter le groupe à plein temps.

 

4/ Un nouveau type de rapport aux adultes.

L'enseignant se situe à une place très différente de celle de l'adulte familial. Il représente les attentes et le pouvoir de la société. Il rappelle à chaque instant à l'enfant l'obligation de devenir un être social.

 

Ces changements provoquent une crise d'adaptation.

 

Certains observateurs préfèreraient le mot « inadaptation » pour décrire le phénomène. On peut en effet constater que le cours des choses est défavorable. Mais en écrivant « crise d'adaptation » nous estimons préserver la perspective d'une solution tout en décrivant la nature du problème.

Reprenons maintenant un à un ces changements en nous plaçant du point de vue de l'enfant.

 

1/ Les contraintes de la vie scolaire

Parmi celles qui suscitent le plus de réactions, mentionnons d'abord l'immobilité. Elle n'est pas totale, bien sûr, mais par rapport à ce qui se passe à la maison, le fait de devoir rester à sa place aussi longtemps peut être insupportable pour certains enfants qui vont alors retrouver les réflexes habituels d'aller et venir, de quitter une activité, de traverser la classe en courant.. Il en va de même avec le silence, l'obligation de se taire et de ne pas bruiter est inexistante à la maison. Devoir ranger ses affaires ou le matériel collectif peut représenter une nouveauté incompréhensible. De même finir une tâche commencée (ou la reprendre plus tard pour la continuer). Si nous prenons le cas d'un enfant qui en même temps « bouge toujours », bavarde, ne finit rien, ne reste pas à sa place etc... à propos duquel on fait toutes ces remarques aux parents, il est prévisible que dans de nombreux cas, on obtiendra une réaction d'incrédulité ou une protestation: c'est qu'en effet ces conduites n'étaient pas observables à la maison, ou, si elles se produisaient, il n'y avait pas lieu de les relever car elles ne contrevenaient à aucune règle de la vie familiale.

 

2/ Les contenus, la culture scolaire.

Quelques exemples rencontrés dans notre expérience et typiques d'une distorsion possible entre l'appréciation familiale et la sanction scolaire:

Un enfant est qualifié de réservé et de peu participatif en langage. Ses parents s'étonnent; à la maison il est plutôt bavard, « il discute bien avec nous » et souvent. Très apte à s'impliquer avec des partenaires familiers et dans un contexte concret et connu, il peut se montrer craintif en situation collective et sur des supports qui ne lui sont pas très connus.

Un élève de cycle 3 se désintéresse totalement de l'histoire; Pourtant, se souvient la famille, lors des voyage, il s'était montré très curieux à l'occasion de la visite de monuments historiques. En effet, dans le cadre du loisir familial, un enfant se laisse aller à la découverte alors que la « leçon d'histoire » le laisse indifférent; ce n'est pas assez concret pour lui.

Un autre élève, très mal à l'aise avec les nombres, avait pourtant et très précocement, beaucoup joué avec des nombres et des quantités à l'aide de cartes, de dés, de pions. Dans des situations où il était maître de la manipulation, le nombre ne le rebutait pas.

On pourrait apporter bien d'autres exemples. En lecture où un enfant jeune a manifesté longtemps un vif intérêt envers les albums que se parents lui lisaient quotidiennement. En grande section puis en CP, les exercices de lecture sont pénibles. Pour lui il n'existe aucun lien entre le bonheur vécu dans ces situations de proximité avec l'album grâce à la médiation parentale et ces exercices systématiques, abstraits et répétitifs destinés à construire le code de la langue.

 

Ces exemples nous font saisir la différence entre les apprentissages effectués dans le cadre familial et ceux que l'école organise. Les premiers sont pour les enfants assimilables à une découverte spontanée du monde, sans programme, sans contraintes et sans méthode imposée de l'extérieur. L'école se situe exactement à l'inverse de cette expérience. Nous sommes bien d'accord pour reconnaître que dans la majorité des cas, cet écart n'a pas d'inconvénients et qu'il possède même des avantages. Mais cette règle générale laisse passer un nombre important de cas particuliers, lesquels peuvent, à l'occasion, provoquer l'incompréhension de la famille.

 

3/ L'appartenance à un collectif.

Deux grands types de perturbations sont souvent signalées aux familles: les tendances à l'isolement et les conduites agressives. Ces deux façons de réagir, apparemment dissemblables formulent sur le fond un problème unique: « que faire des autres? ».

On entend souvent dire de l'homme qu'il est un « animal social ». L'image est exacte à condition d'ajouter que la sociabilité n'est pas innée et qu'elle n'est pas égale pour tous.

Dans le cas des conduites d'isolement ou de repli sur soi, l'annonce pourra surprendre des parents qui ont l'habitude d'un enfant très proche, recherchant le contact. Plongé dans un milieu inconnu et surpeuplé il peut se sentir affaibli, menacé et la solitude et le retrait, réactions non voulues, constituent une défense contre un collectif éprouvé comme violent.

Celui qui frappe ou mord ses camarades, commet des larcins ou détruit leur travail cherche le contact sans pourtant se servir des outils sociaux pour y parvenir. Il ne sait pas comment s'y prendre pour nouer des liens. On dit qu'il n'utilise pas les codes (gestes et paroles). Cette carence passait inaperçue à la maison et c'était normal puisque dès le début des modalités privées s'étaient pratiquées: on se comprend sans rien demander.

 

4/ L'enseignant, une nouvelle forme d'adulte.

L'installation d'une relation avec son enseignant représente l'une des épreuves de la socialisation de l'enfant. Il découvre peu à peu des différences importantes entre le professeur et les adultes de sa famille, puis des différences entre les professeurs. Cet adulte de l'école est un représentant de la société, il agit au nom de lois qui le dépassent et de règles qu'il pas fixées. Il doit aussi partager ses soins entre de nombreux élèves; on ne peut pas espérer de lui, du moins en quantité temporelle, beaucoup de proximité. C'est un adulte dont il faut souvent se passer, on ne peut pas « coller ». Il évalue l'enfant de façon distancée, médiatisée (par des barèmes, des critères) et non de manière sentimentale.

Quoique faisant le même métier les professeurs sont des personnes différentes et de grands changements peuvent être éprouvés par un enfant d'une année à l'autre et d'une personne à l'autre en cas de service partagé; ce qui est fréquent. Cela oblige les élèves à des remaniements constants, mais c'est aussi une excellente préparation à la vie sociale.

 

Comment soutenir son enfant en cas de crise d'adaptation?

 

Tous les conseils que nous proposons ici visent un même but: sécuriser l'enfant. Il est déjà perturbé par les inconvénients qui se présentent à lui dans l'école, autant ne pas le surcharger par de mauvaises manœuvres à la maison.

Nous avançons en deux étapes: en premier lieu nous signalons les trois risques à éviter; ensuite nous décrivons trois axes pour agir.

 

1/ Les fausses manœuvres ou les mauvais réflexes.

S'estimer mauvais parents, porter sur soi la difficulté de notre enfant, souffrir à sa place, penser que nous ne l'avons pas bien préparé à la scolarité... de nombreuses formulations conviennent, au cas par cas. Elles décrivent se qui passe par la tête dans ces circonstances.

En vouloir à son enfant en lui reprochant de ne pas être à la hauteur (celle qui nous conviendrait) aboutit à lui infliger une « double peine ». Il va devenir celui qui déçoit tout le monde.

En vouloir aux enseignants, décréter les enseignants incapables (de « comprendre » notre enfant) ne fera que retarder les recherches de solution. C'est également une attitude qui embarrasse l'enfant (il doit de toues façons continuer à fréquenter l'école et les enseignants déclarés insuffisants par sa famille).

 

2/ Trois axes pour agir.

D'abord agir envers soi-même. C'est sans doute, dans l'ordre chronologique, la première étape. Considérer que ce qui arrive à notre enfant nous présente une nouvelle tâche (une de plus) dans notre métier de parents. Il ne s'agit pas d'une injustice, d'un événement choquant qui n'aurait pas dû se produire, mais d'un incident normal dans la vie d'un enfant qui avance dans son développement. En raisonnant ainsi, le parent prend sa place et se réapproprie l'incident au lieu de se sentir persécuté.

 

Ensuite se placer sans tarder dans une position de coopération avec l'école. Si l'enseignant a pris contact avec la famille, c'est qu'il pense qu'une association entre lui et les parents sera efficace. Signifier à l'école que l'on participera du mieux que l'on peut à la résolution du problème apporte immédiatement une amélioration. L'enfant concerné ressentira très vite que l'ensemble des adultes va contribuer à la sortie de sa difficulté.

Enfin, se placer devant son enfant de telle manière qu'il puisse se repérer dans ce qui lui arrive. On le troublerait beaucoup en ayant l'air de ne pas voir ce qui se passe, mais également en se désintéressant de la situation ou en le condamnant, en l'enfermant tout seul dans son souci. Il est utile de lui dire que, d'une part on sera à ses côtés, mais en même temps que l'on ne peut pas tout pour lui. A certains enfants, trop passifs, on expliquera que les parents n'ont pas à faire disparaître les appréciations ou les sanctions formulées par l'école mais que tous les adultes auront la même vigilance. A l'enfant très émotif, on explique que l'événement fait partie d'une vie scolaire ordinaire et que l'on n'est pas décidé à dramatiser.

Partant de l'affirmation « nous connaissons notre enfant », formule sincère et provisoirement exacte, nous avons observé que cette connaissance n'était pas achevée et que l'entrée à l'école et la scolarisation longue nous révélaient des aspects nouveaux. Ces aspects ne constituent pas des anomalies, des bizarreries, mais manifestent les tentatives successives de l'enfant pour s'installer dans le rôle d'élève. Notre société occidentale et moderne accorde une telle importance à l'école et celle-ci tient une place si grande dans la vie d'un enfant que nous avons fini par penser que la scolarité était naturelle, dans le « programme » normal du développement. Il n'en est rien et les passages difficiles sont fréquents et concernent – d'une façon il vrai plus ou moins aigüe – presque tous les enfants.

Il en résulte une manière appropriée d'être parent d'élève. Elle consiste à prolonger, à enrichir la parentalité par un accompagnement patient de l'enfant sur un itinéraire en partie imprévisible.


Date de création : 26/08/2014 @ 16:01
Catégorie : ACTIVITES - Les parents d'élèves
Page lue 726 fois
Précédent  
  Suivant

Recherche
Recherche