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En quoi consiste l'éducation scolaire?


 

La proximité des deux mots « éducation » et « école » aboutit à une notion très vague à l'intérieur de laquelle les valeurs des deux termes font répétition: l'école est éducatrice et l'éducation est, pour une part essentielle, scolaire, surtout en considérant la durée de la scolarité. Il est alors nécessaire d'en passer par une définition capable de redonner à cette formule une signification précise.

Relevons, sans nous attarder, le changement d'appellation qui a eu lieu il y a quelques décennies, au moment où « l'Instruction Publique » est devenue « Éducation Nationale ». Cette innovation n'a pas entraîné de soupçons. Bien au contraire elle a séduit les enseignants qui y ont vu une revalorisation – au moins symbolique – de leur métier. La nouvelle étiquette comblait également les attentes sociales de l'époque qui misaient considérablement sur l'éducation pour le développement social en général et pour l'accroissement du bonheur individuel.

Cette nomination, si attrayante auparavant, a perdu une bonne part de son charme en raison de la difficulté croissante pour les professeurs d'exercer leur métier, mais également à cause de la méfiance d'une partie de l'opinion publique à l'égard de l'éducation pratiquée en milieu scolaire.


 

Précisons chacun des plans de ce double discrédit. Pour les enseignants, éduquer en milieu scolaire est devenu une entreprise tellement envahissante qu'elle concurrence l'enseignement proprement dit. De plus, les résultats de cette action pourtant intense peuvent être très limités. Devant ce constat, il est fréquent que nombre d'entre eux revendiquent le retour à l'enseignement « pur », allant parfois même jusqu'à affirmer que l'éducation des enfants ne relève pas de leur responsabilité.

L'opinion publique n'est pas, dans son ensemble, très critique devant l'idée d'une école éducatrice. Elle s'est habituée à cette formule et la tient pour une évidence sans s'embarrasser de produire une justification de cette mission. Mais on observe tout de même une érosion de ce consensus, surtout à l'intérieur de quelques couches sociales devenues méfiantes à l'égard d'une éducation par l'état et donc par l'école. Cette catégorie de parents n'apprécie pas ce qu'elle estime être du laxisme éducatif dans la vie scolaire et désapprouve le relativisme des valeurs que l'école prétend transmettre aux enfants.

Si une éducation scolaire se justifie, elle se situera donc en dehors de la zone des confusions et des conflits que nous venons de décrire. Nous allons nous attacher à la définir en faisant d'abord apparaître son autonomie (elle se distingue par exemple de l'instruction morale et de l'éducation civique) puis sa nécessité (elle conditionne la possibilité d'enseigner ou d'apprendre) et enfin son actualité (elle est urgente compte tenu d'un certain relâchement de la contrainte sociale).


 

L'autonomie de l'éducation scolaire parmi les missions de l'école.


 

1/ L'éducation scolaire n'est pas l'enseignement.

L'enseignement porte sur des contenus, répartis par matières et fixés par les programmes. L'éducation scolaire serait, si l'on veut reprendre une distinction acquise, plus du côté du savoir-faire et du savoir être, que du côté des savoirs. Mais ce n'est pas assez précis car il existe toutes sortes de savoir-faire et de savoir-être.

Les capacités que l'on veut développer en éducation scolaire concernent le « savoir-être élève » et les savoir-faire qui se rattachent à cette position. L'image du « métier d'élève » pourrait ici être suggestive. Il ne s'agit pas de capacités requises par « la vie » en général ou « la vie en société » mais par la vie scolaire. Celle-ci possède des caractéristiques propres liées aux contraintes extrêmement fortes, exercées par l'école sur l'enfant.


 

2/ Il ne s'agit pas d'éducation morale.

Celle-ci vise à inculquer des valeurs, autrement dit, ce à quoi une société attache du prix, ou encore, pour être tout à fait clair, la façon dont elle distingue le bien du mal. Que ces valeurs varient d'un lieu à un autre et fluctuent au cours du temps ne change rien à la fonction de la morale qui est d'installer des normes sociales de la conduite. On a, autrefois, enseigné la morale à l'école. Il s'agissait d'ailleurs d'une « matière » inscrite à l'emploi du temps et divisée en chapitres précis.

La modernisation des mœurs a fait tomber cette pratique en désuétude en faisant apparaître objectivement ses traits rigides et naïfs sans se rendre compte des conséquences de cet abandon: l'école légitime ainsi et renforce le relativisme moral et même l'amoralité qui affaiblit notre société. Nombreux sont ceux qui s'alarment de ce phénomène ressenti comme très menaçant, plus rares ceux qui proposent de restaurer un enseignement moral, toujours discrédité par les ambitions modernistes. Nous n'entrerons pas davantage dans ces considérations. Nous les effleurons pour marquer la différence entre les deux domaines. L'éducation scolaire ne concerne en rien les valeurs, elle ne vise que l'installation des conditions propices à l'enseignement. L'insistance que nous mettons sur la distinction évitera la confusion persistante qui pourrait, par exemple, faire suspecter l'éducation scolaire de dégénérer en une sorte de morale de l'écolier ce qui serait mauvais autant pour elle que pour la morale dont il faut poser clairement la nécessité.

3/ L'éducation scolaire n'est pas l'instruction civique.

Il existe un large accord pour confier à l'école la préparation civique des enfants. Dès qu'il s'agit de décrire aussi bien les finalités de celle-ci (quel type de citoyen?) que les contenus scolaires correspondants, le débat s'ouvre de façon très large. Ainsi l'éducation civique (formule qui concurrence l'ancienne « instruction civique ») est-elle devenue un objet flou. Ses ambitions vont ainsi de la connaissance, même succincte, des institutions jusqu'à une formation de citoyen responsable à un niveau mondial. Les notions de solidarité, de « respect » qui sont mises en relief recouvrent des préceptes tout à fait variés et agglomèrent des domaines qui sont contaminés par l'idéologie. C'est le cas quand on envisage de charger l'école de tâches concernant l'égalité des sexes, l'équivalence des pratiques sexuelles et même des mots d'ordre apparemment très désintéressés comme le respect de l'environnement, la protection de la nature sont loin d'être compris de la même façon par tous. On a parfois le sentiment que l'éducation civique recycle la vielle morale en la laïcisant et en la modernisant au maximum. Si l'instruction ou l'éducation civique parvenait à se reconfigurer hors de ces dérives, elle n'en resterait pas moins distincte de cet ensemble d'attitudes et de savoir-faire scolaires efficaces que nous couvrons sous l'étiquette de l'éducation scolaire.

Il faut cependant considérer l'articulation entre l'éducation civique au sens large et notre éducation scolaire dans la mesure où notre intention de « faire de l'élève » rejoint en partie le projet de construire le citoyen. Est-ce que ces deux visées vont de pair? Est-ce que l'assimilation des règles de la vie scolaire est, dans nos sociétés, le préalable ou le premier degré de la responsabilité civique? Ces questions sont intéressantes et nous aurons à les reprendre.


 


 

La nécessité d'une éducation proprement scolaire.


 

Entendons nous sur la portée du mot « nécessité ». on dit souvent qu'une chose est nécessaire parce qu'on lui accorde de la valeur. Il ne s'agit pas ici de cette sorte de nécessité mais d'une nécessité qui s'impose, qui est logique: on ne peut pas faire autrement, l'éducation scolaire est imposée par le fait de devenir écolier.

Pour bien le comprendre une prise de distance par rapport à nos vues habituelles sur la scolarisation est à effectuer. Dans nos sociétés occidentales modernes, l'ancienneté, la généralité et l'obligation de l'école ont laissé croire qu'il était naturel de devenir écolier, ce qui est faux. Il n'existe nul programme biologique, nulle caractéristique génétique ou prédisposition naturelle. La preuve en est que pour un nombre significatif d'enfants, l'obligation ne se passe pas bien et pour quelques uns plutôt mal.

De ce point de vue, l'école primaire (maternelle puis élémentaire) se trouve placée dans la zone la plus sensible de la scolarisation puisqu'elle reçoit des enfants âgés de 3 à 12 ans. Ceux-ci doivent devenir des élèves tout en poursuivant leur construction en tant qu'enfants. Il n'y a pas de contradictions entre ces deux dynamiques, mais tout de même une certaine tension car les exigences de l'école ne sont pas du tout de même nature que les contraintes familiales .D'autre part les enseignants qui ont la charge d'imposer ces contraintes ont toujours à tenir compte du degré (toujours limité) de maturité générale des enfants.

La familiarisation avec les contraintes de l'école ne se fait pas « naturellement », par accoutumance. Elle s'effectue par apprentissage. Autrement dit l'école et ses agents doivent organiser cette construction de l'élève, la rendre progressive, l'installer par étapes, tenir compte des différences entre les élèves et surtout s'orienter sur une définition assez précise de ce que doit être un élève en tant que tel.


 


 

Actualité de l'éducation scolaire.


 

Le paragraphe précédent sous-entend que l'éducation scolaire ne peut être une nouveauté puisqu'elle est impliquée par la scolarisation. Pourquoi parler d'actualité? Pour souligner un renforcement du besoin et même un caractère d'urgence.

Le besoin de trouver des solutions pour « faire de l'élève » se fait pressant en raison d'un décalage croissant entre le degré de maturité d'un grand nombre d'enfants d'aujourd'hui et les exigences de l'école. Cette affirmation va surprendre ceux qui croient que l'investissement très fort des familles sur l'école facilite le « devenir écolier ». Cette orientation ne suffit pas à placer les enfants en position d'élèves. Le sur-investissement scolaire de notre société ne porte que sur un certain type de résultat scolaire, disons le diplôme pour faire vite, il néglige le reste.

Le décalage trouve aussi sa source dans une conception moderne de l'éducation beaucoup plus permissive, voire laxiste, qui envahit la société en général puis la famille.. On pourrait alors imaginer que l'école « s'adapte », se rapproche de cet état social et familial. C'est d'ailleurs bien ce qu'espèrent un certain nombre d'observateurs de ce phénomène.

Malheureusement ce n'est pas possible. Quand bien même l'institution scolaire le souhaiterait (elle essaie même), elle n'est pas en mesure de faire table rase de ses exigences. Celles-ci sont constitutives de la scolarisation et de ses composantes (conditions d'accueil, encadrement, objectifs de programme, objectifs de réussite).

Même si l'école (adoptons un raisonnement par l'absurde) n'était pas tenue de fournir un niveau de connaissances et de diplômer la grande majorité de ses élèves, elle n'en demeurerait pas moins très contraignante, car un élève qui apprendrait peu n'en reste pas moins un élève, c'est à dire un enfant qui est obligé d'adopter les comportements exigés par les conditions matérielles, l'emploi du temps, la vie collective et les apprentissages en commun. Or, la société, bien loin de se montrer tolérante sur le niveau acquis, la réussite et la délivrance du diplôme, affirme une exigence croissante à ce sujet. On peut se reporter aux mots d'ordre très énergiques concernant la fin de l'échec, le relèvement du niveau, les diplômes et l'égalité des chances etc...

On comprend alors mieux ce que l'on veut suggérer par « l'actualité » de l'éducation scolaire: l'école, constatant le décalage entre ses exigences et la souplesse éducative généralisée, sommée de faire toujours mieux pour le niveau des élèves, doit s'efforcer de consolider les pré-requis, les conditions de ces apprentissages. Il lui faut au moins rattraper ou compenser les abandons sociaux et familiaux (dans la mesure du possible) et installer les conditions de l'enseignement. Ces dernières étaient auparavant pré-formées dans les exigences sociales et familiales. Non que la société et les parents se soient attachés à « fabriquer de l'élève » mais il existait un contrat collectif tacite qui indiquait assez clairement à tous un cap d'exigences et de fermeté qui facilitait la scolarisation (au sens d'une entrée dans la vie scolaire).

Ce constat ou plutôt cet accord tacite est aujourd'hui particulièrement fragilisé du fait d'un nombre croissant de familles qui se trouvent éducativement affaiblies. Les nouveaux élèves constituent alors un ensemble beaucoup plus hétérogène que par le passé.

Pour un enseignant, bien que le constat soit décourageant, il n'est guère envisageable de demeurer passif car il n'y a pas un minimum possible d'enseignement sans un minimum d'attitudes scolaires consenties de la part des élèves.


 

Le domaine de notre site que nous ouvrons sous le titre « éducation scolaire » groupera toutes les réflexions, élaborations et propositions concrètes susceptibles de favoriser l'adaptation de nos collègues à cette situation délicate que la formation traditionnelle n'avait pas prévue.


Date de création : 03/01/2013 @ 10:06
Catégorie : ACTIVITES - Education scolaire
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